Au bon moment
Les bipèdes prennent actuellement peu l’avion. Sur l’aéroport de Doha, certains ont récemment même dû faire un détour par le terminal fret de Qatar Airways. Ce qu’il a fallu d’autre pour acheminer des lions, tenus en cages, jusqu’à la semi vie sauvage d’une zone naturelle protégée sud-africaine, et les perspectives du fret aérien ont été révélés par Kirsten de Bruijn à Andreas Haug, rédacteur de l’ITJ.
Madame de Bruijn, après onze ans chez Air France KLM Martinair Cargo et Emirates Skycargo, vous avez rejoint en septembre dernier Qatar Airways Cargo – juste à temps pour accompagner le plus récent projet, à savoir l’initiative «WeQare» depuis le début. De quoi s’agit-il exactement?
Il y a un an Qatar Airways Cargo a lancé «WeQare» qui donne un cadre à des activités ponctuelles ayant un caractère durable. Le Chapter 1 a couvert la partie humanitaire, ce qui tombe bien vu la pandémie de Covid-19. Récemment, le décollage simultané de trois de nos avions-cargos acheminant du matériel humanitaire de Doha vers Bengaluru, Mumbai et New Delhi a été particulièrement impressionnant. La compagnie aérienne avait déjà organisé un convoi comparable en février 2020, à l’époque vers Beijing, Guangzhou et Shanghaï [cf. ITJ Daily, 25/02/20].
Le Chapter 2 devait porter sur les animaux. Nombreux sont les qataris qui accordent beaucoup d’importance au bien-être animal. Pendant que nous réfléchissions encore à ce que «Rewild the Planet» [cf. ITJ 13-14/2021, p. 6] pourrait signifier, notre responsable du fret, Guillaume Halleux, a obtenu en octobre un courriel de Lionel De Lange, le fondateur et directeur de Warriors of Wildlife (WOW), une ONG qui s’engage pour les animaux en Ukraine. Sa demande concrète portait sur le transport de sept lions, appartenant à des particuliers, vers un environnement plus approprié.
Que fallait-il pour y parvenir?
Nous avons mobilisé une grande et excellente équipe, plus de 50 collaborateurs de plus d’une douzaine de services. C’était la seule façon de boucler cette mission avec succès en seulement six mois. Il fallait les autorisations des autorités ukrainiennes et adapter à trois reprises le déroulement des opérations afin que la liaison Kiev– Johannesbourg via Doha fonctionne sans problème.
Quel a été le rôle du réseau de la compagnie dans ce projet?
Dans un premier temps, nous avons détourné un «preighter» de l’Europe de l’Ouest vers Kiev qui a accueilli en soute les fauves et leurs soigneurs pour la première étape de 5,5 heures. À Doha, où notre personnel devait en outre suivre les règles du Ramadan – alors que les fauves ont été approvisionnés en viande fraîche à raison de 30 kg par animal – a eu lieu le transbordement vers un A350 assurant un service passagers régulier. Afin d’éviter tout stress supplémentaire pour les animaux et de gagner du temps, l’avion a été préparé exceptionnellement au terminal fret pour la poursuite du voyage. C’est par là que transitent régulièrement des animaux exceptionnels tels que des serpents ou des rhinocéros, mais des lions sont encore une autre affaire.
Les coûts d’un tel projet peuvent-ils être exprimés concrètement, d’une façon ou d’autre autre?
Nous ne voulons bien sûr pas révéler de détails donnant une idée de notre tarification. Mais grâce à la combinaison de notre matériel volant, nous avons trouvé la voie la plus rentable. Sur le «preighter» de Kiev vers Doha il a fallu trois positions d’ULD et sur l’A350 vers Johannesbourg il s’est agi de huit. Toutes les équipes étaient très engagées et leur coopération m’a paru impressionnante.
Et ensuite, après le vol?
Au terme d’un transport par camion qui a duré douze heures, les lions sont arrivés en bonne santé près de Port Elizabeth et y découvrent maintenant leur nouvelle liberté. Chez Qatar Airways Cargo, nous sommes conscients de notre responsabilité pour le monde, nous travaillons avec d’autres ONG et allons bientôt annoncer la prochaine action du Chapter 2.
Qu’en est-il en matière de pandémie?
Nous sommes très actifs et avons livré jusqu’à la m-mai plus de 7 M. de doses de vaccin dans 29 pays. Dans le cadre de l’initiative Covax nous avons transporté 9 M. de doses de plus vers 14 pays. Nos activités ont à peine été entravées. Nous pouvons nous estimer heureux puisque 70% des habitants du Qatar et 93% de nos employés sont vaccinés.
Et quelles sont les perspectives?
2021 demeure une année forte pour le fret aérien. L’e-commerce continuera d’alimenter la demande en mini avions-cargos. Nous nous réjouissons de plus des opportunités qu’offrira la Coupe du monde de football en 2022.
